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mardi 24 avril 2018

Ligne 8

Crédit photo : Pixabay


République. Je trouve une place assise.

Strasbourg - Saint-Denis. Côte à côte, épaule contre épaule. Comme moi il part travailler un peu fatigué. La cinquantaine ? Il lit des mails sur un smartphone. Il se tient - même assis - comme un ancien militaire. La raideur, et puis ses vêtements, usés un peu, pratiques, son sac besace...

Bonne nouvelle. Il balaye l'écran d'un coup de pouce, des intitulés de mails défilent, il s'arrête sur un. Relevé de comptes, Le Crédit Lyonnais. Il le parcourt, zoom sur une ligne de dépense, le ferme, en ouvre un second.

Grands boulevards. Un titre froid, concis... clinique. Il en est destinataire, c'est "pour action", on attend son expertise. Il l'ouvre sur une dizaine de photos. Il se concentre sur une ou deux, les agrandit, examine un détail. Une trainée épaisse rouge confiture, le coin des lèvres, un visage blanc. Pas pâle, pas cireux : blanc. Tellement blanc d'ailleurs que j'hésite et crois encore un instant à un happening, à une sculpture. Les yeux sont clos.

Richelieu-Drouot. Pas de soupir, aucune émotion visible. Il ferme le message puis Gmail (j'ai juste le temps de lire son objet une dernière fois : "Photos scène de crime Chloé T***").

Opéra. Il ouvre Les Echos, scanne un article ou deux.

Madeleine. Il quitte la rame.

lundi 8 septembre 2014

"Un petit billet"

Pic trouvée sur http://www.jammer-store.com
Si je prête surtout mon attention au décor, je ne dédaigne pas non plus laisser traîner mes oreilles et reconstituer les conversations des acteurs de mon petit théâtre mental.

Hier, dans le train, ce fut même un peu trop facile... Ces bribes, telles que tout un wagon a pu les entendre (je prenais des notes) :

"Dis à personne... petit service rémunéré... tu veux te faire un petit billet ? Tu as entendu les histoires...Non je peux pas te raconter je suis dans le train... passe la ou j'habitais, K*** va te donner un truc pour moi... accident de voiture, cartonné des mecs qui fallait pas alcool pas de permis, des gars de la résidence... interdit de 77, même à la gare je vais pas... il a fallu que j'arrose tout le monde, t'en parle à personne ! Donc tu passes, il va te donner de l'argent et une petite boulette... tu garderas un billet... t'inquiète je te rembourse l'essence... pas urgent hein, dans une heure ? T'es un boss, gros."


mardi 8 mai 2012

Quite unlikely

Lui... Japonais, bagué, béret français sur la tête, une incroyable moustache à la Picasso, barbe blanche touffue. Ses fringues délicieusement excentriques : Autoportrait en pied de l'artiste.

Elle... Passe partout. Gilet noir. D'elle j'ai tout oublié, ce n'est pas sa main que je voulais prendre. Elle est juste apparue dans le champ quand j'ai voulu faire l'image.  Modestie personnifiée..

J'aime dans le métro ces mariages,  improbables, éphémères.

lundi 2 avril 2012

Deux hommes


Ils marchent ensemble, ils se fréquentent. J'aime comment l'un touche tout naturellement le bras de l'autre. Le premier porte des vêtements confortables. L'autre aussi. Le premier transpire l'effort. L'autre aussi. Le premier a les yeux grands ouverts. Pas l'autre, une canne blanche repliée dans la poche. Ils courent en duo.

mardi 13 mars 2012

Les signes de reconnaissance


Il parle sans arrêt à son chien. Fort. Fait mine de lui reprocher de s'approcher un peu trop près de nous. Nous, les autres, ses pairs : il ne s'adresse pas à nous directement mais meurt d'envie que quelqu'un le fasse, le chien comme vecteur. Il a faim, ce beau dimanche de mars. Cette faim ordinaire, immense, d'attention. Faim de signes de reconnaissance, d'inclusion. Un signe de tête, un sourire. Un compliment. Un soupir excédé même. Tout est préférable au vide.

Inconsciemment, je vais passer les quinze minutes suivantes à ne pas établir le contact. Pourquoi ? Parce qu'il existe un marché de ces signes. Une économie, l'offre et la demande, des lois. On organise la pénurie. Le psychologue Claude Steiner le résume comme suit :

  • Ne demande pas les signes de reconnaissance dont tu as besoin (”Ils sont trop chers, on ne te les donnera jamais !”)
  • Ne donne pas les signes de reconnaissance que tu souhaites donner (”Tu n’en auras plus !”)
  • N’accepte pas les signes de reconnaissance dont tu as besoin (”En période de disette, il vaut mieux les stocker à la cave que les utiliser”)
  • Ne refuse pas les signes de reconnaissance dont tu ne veux pas (”Ceux là je peux me les offrir, ils sont moins chers”)
  • Ne te donne pas de signes de reconnaissance positifs à toi-même (”C’est du gâchis !”)





vendredi 9 mars 2012

Paris - Marseille


Moisson hier. Marseille !
Je "google" certaines de ses phrases, la citation de Gaudin, rien... Pas de version en ligne de ce qu'il choisit. 20 Minutes, Métro, les quotidiens qu'on laisse sur le quai. Cahuette, on cherche tes sources...

jeudi 8 mars 2012

Station Hôtel de Ville - Suite

_annabelle_ a croisé Cahuette mi-février. On apprend grâce à elle, "[qu'il] utilise la presse gratuite comme source d'inspiration [...]" et qu'il "était un peu tendu car un autre homme squatte le même coin."


Je l'ai vu deux fois cette semaine. Barbe fournie, en pointe, capuche enfoncée sur la tête. Il campe au pied de son affiche, a fait de ce coin de couloir sans aucun confort son coin de couloir...

dimanche 4 mars 2012

Shush


Fin d'après-midi. Un papier journal sur la banquette, soigneusement, pour protéger le fauteuil de ses pieds. Ses vêtements sont propres, son pantalon repassé. Caché sous son manteau, il dort, pudique. Trente minutes de répit d'un bout à l'autre de la ligne 11, est-ce qu'il se réveille au terminus avant de changer de 
direction ?  Dormir pour que passent les heures... 

Je croise un sdf tous les jours, station Arts et Métiers. Sa joue est énorme. Cancer ou abcès, il souffre manifestement. Lui dort pour oublier la douleur. 

Le sommeil comme fuite.


mardi 21 février 2012

Batucada



En ouverture samedi du le défilé du carnaval de Paris.

Tam tadam tadam, les caixas nous appellent... Bom BOM, les surdos cognent. La foule commence à crier, sauter, danser. C'est la batucada !

lundi 20 février 2012

RER B


Le n&b, le carrelage au mur, le dallage en béton sordide. Une fille en noir qui attend, quasi-immobile, pendant quinze bonnes minutes. Et lui, les pommettes saillantes, à sa place je trouve, très slave... Immobile, je voyage.

vendredi 17 février 2012

Invisible

2008 ou 2009 ? Pizza Pino, à midi.

Moi d'attendre que la serveuse prenne ma commande. Inter dans les oreilles, immobilité quasi-parfaite, j'observe. Mes voisins tout autour sont des coquilles vides : je les aime tous, je les méprise tous. Sourires automatiques, politesse insincère, implantée. La confiance facile; ils me raconteraient tout d'eux.

Ils sont beaux à vomir, agités pour un rien, occupés d'un rien. Laids de mesquinerie et de petits calculs. Attachants.

Attachante la grand-mère attentive au bonheur de son petit-fils arrogant à gifler. Attachant, le cadre bedonnant à cravate rouge, chevalière au doigt. Attachant ce petit couple mièvre. Attachants, ces collègues que je me suis depuis empressé d'oublier. Attachante, ma serveuse...

Vieille-belle, teinture noir-corbeau. Méprisante de servilité, le "merci Monsieur" au bord des lèvres, le coeur au bord des miennes. Je devine la menace permanente, une hantise de se faire vider, remplacer par une blondinette plus "accorte" qui aurait le quart de son âge. Une qui nourrirait plus efficacement les fantasmes des quadras frustrés qui mangent ici en bande.

Ma vieille serveuse, tes mercis, tes cheveux. Ta peur de prendre un tir, peur de ton chef de salle. Je te regarde et tu te fous de moi comme des autres, on se remplit tous le ventre d'une même bouffe au goût de cendres. Que je sourie ou non ton salaire sera le même. Moi figé, toi qui cours. J'ai envie de me lever, de te secouer, de te mettre en colère... Mais je suis invisible.


mardi 14 février 2012

Brèves de comptoir


Je suis tombé sur un nid, pourtant c'est une espèce en voie de disparition. Deux jeunes femmes assises à une table voisine, je note les bribes qui me parviennent :

« Ils parlaient de sexe, heureusement j’ai l’habitude avec mes frères, je ne me choque pas facilement. [...] sur des lits superposés, pas pratique elle disait [...] rentrée à 6h00 du matin, crevée. Tu sais il milite à l'UMP ! [...] C'était plein de Chinois et de Pakistanais, j'ai dit "on est pas au Pakistan là hein, ça va !" [...] une réunion contre le vote des étrangers [...] la menace socialiste [...] éviter les triangulaires pour les législatives, ils filent des signatures à Marine [...] le bilan est pas catastrophique mais heu…. »

Constat : bon sang, mais il reste des sarkosystes dans ce pays. Et des jeunes en plus ! Il nous reste plus qu'à leur souhaiter bon courage...


samedi 4 février 2012

Sous nos pieds...


Sous nos pieds c'est la guerre. Des affiches qui peuvent aisément passer pour sexistes. Une héroïne inconnue qui signe en mélangeant le A anar' et le symbole féminin, station Pyrénées. Elle s'insurge et l'écrit (haut et fort). Simplement pour l'image de l'annonceur, de la marque, c'est vexant, comprenez. Alors ils ont opté pour la discrétion : une grosse feuille verte collée par-dessus.

Elle ("E" majuscule), a répondu. C'était il y a de cela une dizaine de jours. Elle a répondu et ils ont continué, recouvert à nouveau ses protestations, couche sur couche. En pure perte, à regarder l'affiche... c'est Elle qui a gagné.

vendredi 27 janvier 2012

Little John


Tu marches vite, j'ai peine à te suivre. Tu tends le bras, poing fermé, index et majeur tendu, vises les affiches : BANG BANG ! Babylone tombe touchée au coeur. Tu viens de chanter dans ma rame, anglais jamaïcain parfait, "Yeah man !" entre les couplets. Personne ne t'a rien donné. C'était bien pourtant... Je te baptise, Little John.

vendredi 13 janvier 2012

Les marcheurs de St Lazare


Ils me semblent bien sympathiques, ces plutôt jeunes retraités. Je les croise souvent à Saint Lazare, attendant leur train. Ils partent pour le Vexin, parc naturel qui touche les Yvelines. Ils sont équipés, je fixe leurs chaussures. Baskets pour certains, vraies chaussures de randonnée pour la plupart, havresacs. 

Un homme en chaussure de ville fait contraste, sac en plastique à la main. Je devine : il accompagnait sa femme à la gare.

samedi 7 janvier 2012

Police !



Visite-éclair au commissariat du coin pour retirer un justificatif. Deux ou trois hommes fument leur cigarette devant, adossés à la rambarde qui longe l'entrée handicapé. Je serais bien embêté si je devais leur coller une étiquette : flics en civil, truands ou victimes, ils ont tous la même tête, cette après-midi.

mercredi 4 janvier 2012

Portrait de famille : Steven


Portrait en creux.

Ian est présent, là, sur cette photo. Il vient en France une fois par an, on se voit ou pas, et quand on peut passer deux ou trois jours ensemble on se raconte. Des vies qui bizarrement se ressemblent un peu.

Ian est brillant, de la graine d'ingénieur à l'ancienne. Il dessine à merveille, sait peindre, a pondu une maquette pour  un musée de Leicester (la marée). Mais Ian est aussi (surtout ?) le frère de Steven, et de lui je ne connais rien. La photo d'un ado admiré, sur une moto : "Il fait du cross", on disait en France. Un cadre qui a longtemps pris la poussière sur une commode, longtemps après la fin de son adolescence, la fin des courses de moto. Il a disparu. Pas mort, évaporé.

Ça semble presque trop facile : diminuer la fréquence des contacts, des coups de fils, ne plus envoyer de carte de voeux. Assister aux anniversaires de loin en loin, s'excuser, ne pas pouvoir, manquer Noël une fois, une autre... et un jour déménager sans laisser d'adresse.

dimanche 18 décembre 2011

Mita Coiffure





Dans mon Guinness book of World Records imaginaire, voici le plus petit salon de coiffure au monde. Presque aussi étroit que la porte d'entrée qu'il jouxte.

Tout juste assez large pour que le coiffeur puisse officier derrière son client.

J'ai envie de le tester. Surtout depuis que dans mon salon de coiffure habituel l'un des deux garçons, en voyant une vidéo de Britney Spears, a cru bon de lancer :

"Elle, il faut la violer."

Pauvre con...

lundi 12 décembre 2011

Elvis


Un autre portrait de dos. A contre-jour, mon taximan de la nuit. Coïncidence, après l'avoir écouté un peu plus tôt : Elvis est vivant ! Coréen. Et aussi rondelet que l'original en 77. Hail to the king!

jeudi 8 décembre 2011

Jean-Jacques


Ligne 3. Serrés comme des sardines. Tout le monde tire une tronche de cent pieds de long, à devoir transpirer si tôt le matin. Tout le monde mais pas Lui. Habillé comme un cadre, costume impeccable, serviette  en cuir accordée entre les jambes, à même le sol, il sourit. Et me hérisse le poil. Suffisant. Tellement au-dessus de nous tous, adossé à sa barre centrale. Invariable. Petit à petit le wagon se vide, il ne bouge pas. Je le baptise : Jean-Jacques.
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